Le 29 octobre dernier, le très réputé paysagiste Michel Corajoud a rejoint les jardins de l’éternité à l’âge de 77 ans, emporté par un cancer. Considéré comme le grand maître du paysagisme contemporain français, il était aussi urbaniste, enseignant, et surtout passionné par la nature. Très créatif, il a participé à des réalisations prestigieuses telles : le parc du Sausset (93) ; le parc urbain de Saint-Denis de La Réunion ; L’avenue d’Italie et le jardin d’Eole en bordure des voies ferrées de la gare de l’Est, à Paris ; le Parc de Gerland et la Cité internationale de Lyon ; et surtout la transformation des quais de la Garonne à Bordeaux.
Après des études aux Arts-Déco, Michel Corajoud découvrit sa vocation de paysagiste au début des années 1960. En 1967, il fonda au sein de l’Atelier d’urbanisme et d’architecture, une équipe de Paysage urbain, puis il créa en 1980, avec son épouse, l’Atelier Corajoud. Il a contribué à décomplexer les paysagistes pour les placer sur un pied d’égalité avec les architectes et les urbanistes.
Lauréat en 1992 du « Grand prix du paysage », il remporta le « Grand prix de l’urbanisme » en 2003. En 2013, il fut couronné par la première édition du prix international André Le Nôtre, lors des « Journées André Le Nôtre » organisées à Versailles par Val’hor. Son leitmotiv consistait à ne pas opposer la nature à l’urbain, affirmant : « Partir du paysage pour penser la ville me semble une démarche fondatrice extrêmement pertinente. » (Le Moniteur Spécial Aménagement, 2004)
Enseignant très investi et soucieux de partager ses savoirs, Michel Corajoud s’est beaucoup impliqué dans la transformation de l’École nationale d’horticulture en l’École nationale supérieure du paysage de Versailles (1977). Il y a enseigné pendant 37 ans.
Ségolène Royal, ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie a salué Michel Corajoud en ces termes : « Paysagiste de génie, il a anticipé ce que le paysage pouvait apporter à la ville et au territoire. »
Voici quatre très belles réflexions de Michel Corajoud, extraites de son livre : « Le paysage, c’est l’endroit où le ciel et la terre se touchent » (Actes Sud, 2010) :
• « Ce que montre le jardinier en retournant la terre, en éliminant la couche d’oxydation, c’est l’épaisseur active, l’interrègne où le ciel et la terre ajustent en permanence leur mode de coexistence. »
• « Le jardinier exacerbe ciel et terre et nous fait vivre les premiers instants de leur rencontre : il revitalise le sol et travaille sa fécondité. »
• « Le sol, pour un jardinier, pour un paysagiste, c’est une profondeur irritable. »
• « Terre et ciel ne cessent de se quereller dans l’épaisseur du sol arable et de ces querelles naissent les qualités premières de tout paysage. »