Dans le calendrier républicain français, le onzième jour du mois de germinal, est officiellement dénommé jour de la pervenche, une plante très décorative, couramment proposée par les jardineries. Appartenant à la famille des Apocynaceae (dans laquelle on trouve entre autres le laurier-rose et le frangipanier), la pervenche doit son nom botanique Vinca, à Carl von Linné (1707-1778). C’est une simplification de l’appellation Pervinca qu’avait donné à la plante le naturaliste romain Pline (23 – 79) pour bien marquer le fait que cette plante parvient à vaincre l’hiver, une allusion à son feuillage persistant. Le nom vernaculaire pervenche vient de la formule latine vinca pervinca, une formule « magique » crée à partir de vincere (vaincre) car la pervenche aurait des vertus médicinales permettant de vaincre de nombreux maux.
La pervenche est une plante vivace à feuillage persistant et à tiges sarmenteuses qui courent sur le sol et s’y enracinent spontanément dans leur partie supérieure (on dit qu’elles sont radicantes). Les feuilles sont opposées et plutôt coriaces.
Il existe cinq espèces dans le genre Vinca (et quelques sous-espèces), toutes étant des vivaces herbacées ou des sous-arbrisseaux aux grandes fleurs solitaires en forme de tube, portées par un long pédoncule. Le calice se compose de cinq sépales étroits au milieu desquels naît une corolle épanouie formée de cinq pétales.
La pervenche, une plante médicinale reconnue, mais trompeuse
La petite pervenche (Vinca minor) doit certaines de ses appellations populaires, comme l’étonnante « violette de serpents » à ses vertus officinales supposées. Dioscoride, premier siècle et Galien deuxième siècle lui attribuaient la capacité de guérir des morsures de serpents. Au Moyen-Âge, il semble que les sorciers incorporaient de la pervenche dans leurs philtres d’amour, d’où le nom : « Violette des sorciers ».
Au seizième siècle, on préconisait Vinca minor contre les angines (Agricola 1539) et contre les saignements de nez (Matthiole 1554). En 1684, Mme de Sévigné (1626-1696) écrivant à sa fille marguerite, plus connue sous le nom de Mme de Grignan (1646-1705), lui préconisait d’avoir recours à : « la bonne pervenche bien verte et bien amère pour en rafraîchir votre poitrine enflammée » c’est-à-dire pour soigner son angine.
Les feuilles des pervenches sont astringentes, antiscorbutiques, diurétiques, dépuratives (elles débarrassent l’organisme de ses toxines), vulnéraires (elles soulagent une blessure). On utilise couramment les petites et grandes pervenches en homéopathie contre les bourdonnements d’oreilles, les vertiges et les troubles veineux. Elle entre aussi dans la composition du Thé Suisse (avec la dryade).
Aujourd’hui, on utilise surtout l’un des alcaloïdes que renferme la pervenche : la vincamine pour son efficacité dans l’abaissement de la tension artérielle et pour dilater les vaisseaux. Plus de 90 alcaloïdes différents ont été extraits des pervenches.
La pervenche magique
Dans les vieux grimoires, on dit que si l’on vous a volé quelque chose, il suffit de faire frire des feuilles de pervenche dans une poêle, en prononçant les paroles rituelles : « que le Diable sèche ainsi ceux qui m’ont volé, jusqu’à ce qu’ils m’aient rendu mon bien » ! Vous pouvez toujours tenter l’expérience, cela ne coûte rien… Efficacité non garantie.
La pervenche au jardin
Couvre-sol idéal pour une exposition mi-ombragée, la pervenche forme un tapis homogène très décoratif, qui fleurit de mars à mai. Un sol humifère, qui reste bien frais l’été est très apprécié. N’hésitez surtout pas à tailler les tiges trop conquérantes car la pervenche devient facilement envahissante lorsqu’elle se plaît. La pervenche réussit également à l’ombre, mais dans ce cas la floraison est plus réduite.
Pour obtenir un effet très lumineux, plantez le cultivar ‘Illumination’ dont les feuilles panachées apportent une note vraiment tonique dans le jardin. Pour une composition colorée et très naturelle, mariez les pervenches avec des bulbes printaniers, notamment des narcisses et des jacinthes des bois (Hyacinthoides non-scripta).
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